Le champion du monde 1998 et d’Europe 2000 avec l’équipe de France est agacé par l’évolution du poste de gardien de but et appelle à une prise de conscience du monde du foot.

Journaliste : Il y a un sujet qui vous agace beaucoup, en ce moment, c’est l’évolution du poste de gardien de but. Pourquoi ?
Fabien Barthez : << C’est vrai. Cela me dérange et cela m’agace. Je suis un pur passionné du poste, un protecteur des gardiens de but. Quand je vois un gardien faire une erreur, je suis triste pour lui. Quand je vois qu’Hugo Lloris va battre le record de sélections en équipe de France (137 contre 142 Lilian Thuram, actuellement le plus capé), je suis vraiment heureux. Mais je trouve que le football est parti dans une mauvaise direction. Depuis 5, 6 ans, ce jeu a beaucoup changé sur le plan tactique et cela a eu énormément d’impact sur le poste de gardien >>.
CONSTAT
Selon Fabien Barthez, tous les gardiens se ressemblent, ils jouent tous de la même façon, ils réagissent tous de la même façon, c’est devenu complètement stéréotypé. Aujourd’hui, un gardien doit faire 1,92 m, prendre de la place dans le but et être bon avec les pieds. Vous avez beaucoup trop de gardiens défensifs, qui subissent le jeu et attendent que le ballon vienne à eux.
<< Après, il y a aussi cette obsession du jeu au pied et des relances courtes. Ok, ça compte, je peux en parler je crois, mais un gardien de but, ce n’est pas un numéro 10. Un meneur de jeu, cela lui arrive de manquer des passes, non ? Alors imaginez un gardien ! Sauf qu’un gardien en cas d’erreur au pied, ça fait but 9 fois sur 10 >> dit-il.
ÉVOLUTION EXCESSIVE
D’après l’ancien gardien des bleus on en est arrivé à un tel excès que les gardiens n’ont plus aucune créativité. Il faut absolument que cela reparte court, de derrière. C’est comme ça et pas autrement. Si l’adversaire te met en difficulté par son pressing, tu continues à relancer court, sinon tu vas te faire engueuler par ton entraineur. C’est stupide. Le gardien doit réfléchir au jeu et s’adapter au match. Parfois, le jeu te demande de relancer long.
Par exemple, le cas Donnarumma. Quand Gianluigi Donnarumma commet son erreur face au Real Madrid en ligue des champions (0 – 1, 1 – 3) avec le Psg, en huitièmes de final retour. Pour Barthez, qu’il (Donnarumma) apprend. Et de poursuivre ; << je l’adore, j’observe ses performances depuis longtemps et, pour moi, il y a faute de Benzema. Mais sur ce coup-là, il (Donnarumma) a aussi manqué d’humilité >>.
AUTRE CONSTAT
La plupart des gens que l’on entend dans les médias vont vous dire que les ballons volent, que ceci, que cela. « Excusez-moi » reprend Barthez, mais dans les années 2000, les ballons volaient déjà.
Il poursuit : << on en revient à ce que je disais (…) on voit de moins en moins de gardiens aller chercher les ballons dans les airs au point de pénalty ou à la limite de la surface de réparation. Ils font tous 1,90 m et ils ne sortent jamais ! Pourquoi ? Parce que le gardien de but, aujourd’hui, il doit rester sur sa ligne, mettre les bras en croix et prendre de la place. Un bon gardien, c’est un gardien qui coupe l’action avant qu’elle n’arrive devant la case. Le 1er but de Mbappé au Parc des Princes, sur la passe en profondeur de Neymar, jamais il ne doit pouvoir le mettre. Le gardien doit intervenir avant. Ce but, jamais (Manuel) Neuer le prend. Depuis 10 ans, c’est le meilleur le plus complet, ce n’est pas par hasard >>.
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