Avec sa percée spectaculaire au Festival de Cannes, la jeune réalisatrice Ramata-Toulaye Sy incarne le changement de paradigme pour la jeune génération de réalisateurs africains. Elle a réussi l’exploit d’entrer avec son premier film « Banel et Adama » en compétition officielle. Une prouesse !!!

Ils sont cinq en sélection officielle au Festival de Cannes 2023 (la 76ème édition du Festival de Cannes : du 16 au 27 mai 2023) : la Tunisienne Kaouther Ben Hani et la Sénégalaise Ramatoulaye Sy ont l’honneur d’être en lice pour la Palme d’or, le Soudanais Mohamed Kordofani, le Congolais Baloji Tshiani et le Marocain Kamal Lazraq sont entrés dans la prestigieuse section de la sélection officielle.
Il s’agit d’un véritable changement de paradigme, car dans ce panthéon du cinéma, où jusqu’ici, juste les doyens du cinéma africain ont été admis, et cela seulement au compte-goutte, toute une jeune génération fait tout à coup son entrée avec fracas.
En tant que femme et par la fulgurance de son ascension – un premier film à 36 ans – Ramatoulaye Sy, née à Paris de parents sénégalais, sera la figure de proue de cette jeune génération de réalisateurs africains et de ce changement inédit dans l’histoire du cinéma africain à Cannes.
Depuis longtemps, le nom de Ramatoulaye Sy a fait son apparition en tant que scénariste, mais cela fait très peu de temps que celle qui a obtenu un master Arts du spectacle mention cinéma et audiovisuel à l’université Paris Nanterre, assume aussi le rôle de réalisatrice. Avec son talent de scénariste, elle a assisté et appris en 2018 aux côtés de la réalisatrice turque Çagla Zencirci et du réalisateur français Guillaume Giovanetti pour leur film Sibel. En 2019, elle a préparé avec Atiq Rahimi l’adaptation du livre de l’écrivaine rwandaise Scholastique Mukasonga, Notre-Dame du Nil.
« ASTEL », UN PREMIER COURT MÉTRAGE
Mais, c’est qu’en avril 2020, lors du confinement suite à l’épidémie de Covid-19, qu’elle a décidé de tourner son premier court métrage. Astel, primé en 2021 au Festival international de Toronto et en 2022 au Festival du court métrage de Clermont-Ferrand, s’inscrit dans le même environnement que le long métrage qu’elle a envoyé à Cannes. Cette région isolée au nord du Sénégal s’appelle Fouta-Toro et l’a séduite par la présence de Peuls dont elle se sent très proche de leur culture qui privilégie le regard et les gestes corporels aux paroles.
C’est ici, dans cette région et dans cette culture dont Ramatoulaye Sy se sent très proche, qu’elle a situé l’histoire de la jeune Astel. À 13 ans, cette dernière traverse de façon à la fois douloureuse et heureuse le passage de l’enfance à l’adolescence et raconte comment on devient une femme. À Fouta-Toro se déroulera aussi le premier long métrage de Ramatoulaye Sy. Elle avait entamé le scénario de Banel et Adama, il y a sept ans, à la fin de ses études à la prestigieuse école de cinéma Fémis, à Paris.
« BANEL ET ADAMA », L’HISTOIRE D’UN COUPLE
Et comme avec Astel, le message de Banel et Adama, interprété par Mamadou Diallo et Khady Mane, sera universel. Son long métrage d’une durée d’une heure et quarante minutes nous plongent dans la vie d’un jeune couple dans un petit village reculé, au nord du Sénégal. Un amour secoué par les passions des cœurs et des corps, mais aussi par les contraintes d’une société traditionnelle.
La place de la femme et les conditions de vie des femmes dans la société contemporaine lui tiennent particulièrement à cœur. Et c’est le cinéma qui a donné à Ramatoulaye Sy l’occasion de raconter des histoires à sa façon. Parmi les icônes qui l’ont inspirée et guidée pendant sa carrière, se trouvent l’écrivaine américaine Maya Angelou qui avait milité aux côtés de Martin Luther King et Malcolm X, la lauréate du prix Nobel Toni Morrison ou l’écrivaine et militante féministe nigériane Chimamanda Ngozi Adichie.
