
Excellence Monsieur le Président de la République,
Monsieur le Ministre du Travail,
Mesdames, Messieurs les membres du Gouvernement,
Madame la présidente du Comité du haut Conseil du Dialogue social
Distingués membres du Patronat,
Camarades Secrétaires Généraux,
Mesdames, Messieurs, en vos rangs et qualités
Excellence Monsieur le Président de la République, Deweneti
A l’issue de ces deux périodes de pénitence, le carême chrétien et le mois de Ramadan, recevez nos vœux les meilleurs…
Qu’Allah accepte nos prières et nous accorde une longue vie
Qu’il nous accorde la générosité du coeur et apaise nos esprits.
Monsieur le président de la République, ce 3 Mai, vous nous recevez en tant que Syndicat, porte-parole des travailleurs du secteur des médias. Ce 3 mai est également célébré partout dans le monde, la Journée Internationale de la Liberté de Presse. Quelle coïncidence !
Occasion ne pouvait donc être plus belle à saisir pour faire d’une pierre deux coups. Faire une introspection liminaire de ce secteur en pleine mutation qu’est la presse, ne sera pas un exercice aisé, tant il est vrai qu’aujourd’hui nos jeunes Etats subissent de plein fouet, une sorte de disruption de l’Information, à force de propagande et de diffusion de fausses informations. L’infox a de bons jours devant elle si on n’y prend garde. Cette pratique, où le faux prend toutes les allures du vrai, ou le truquage, les montages, les fausses déclarations attribuées, l’imaginaire emprunté, la rumeur amplifiée à travers les réseaux sociaux, est le plus grand danger qui guette notre pays, dont plus de la moitié de la population est âgé de 20 ans et moins.
À l’aune de la Journée Internationale de la Liberté de Presse, un diagnostic sans complaisance par nos soins est un devoir vis-à-vis de la République. Mon discours de ce jour ne sera pas que complainte, ni ne servira à s’essayer à un exercice de délation. Oui Excellence, Nous vous ferons part des manquements notamment des violations des Libertés Syndicales qui, commencent à gangrener malheureusement le secteur des médias, et vous le savez, celui des médias publics. Mais nous prendrons également toute notre responsabilité, pour vous faire part de ce qui est en train de menacer notre atout principal, de pays démocratique jouissant d’une stabilité politique, économique et social légendaire.
Vous permettrez Monsieur le Président de la République qu’on se désole qu’au Sénégal, le dernier code de la presse qui a juste 5 ans, ne soit respecté par quasiment aucun des acteurs. Que le secteur des médias, à la faveur de l’explosion des réseaux sociaux, donne l’impression d’être un secteur incontrôlé où la recherche du gain ou de l’influence, permettent tous les écarts et pratiques malsaines.
Vous permettrez qu’on vous dise notre inquiétude que la propriété des médias soit une nébuleuse, que la création de médias professionnels soit sans contrôle, que n’importe qui, sénégalais ou étranger, puisse se lever et créer un canal de diffusion du faux à destination de notre population et particulièrement de notre jeunesse, et de mettre ainsi en danger par la propagande, les fondements de notre République.
Monsieur le Président de la République, si des pays économiquement plus forts, et historiquement plus ouverts, en viennent à tenter une régulation communautaire des réseaux sociaux, en plus de leur imposer une fiscalité, c’est parce qu’ils sont conscients qu’Internet et ses excroissances sont un formidable outil qui peut booster le développement humain, mais hélas aussi, qui peut déstabiliser en un temps record, jusque dans ses fondations, nos nations. L’Union Européenne vient de décider d’imposer une régulation aux réseaux sociaux avec le Digital Services Act. L’Union Africaine qui a une population plus vulnérables, qui est plus peuplée, qui plus est pour la plupart de ses membres est dans une recherche d’émergence, première étape du développement, est encore statique sur cette question.
Un secteur comme celui des médias doit être régulé. Il ne s’agit pas de gendarmer les producteurs et diffuseurs de contenus informationnels, mais d’établir un cadre juridique de responsabilité et de se donner les moyens de contrôle et de surveillance idoine pour le bien de nos populations. Pour préserver notre jeunesse. C’est possible Monsieur le Président de la République et ce n’est pas un luxe, surtout pour des pays comme le Sénégal, qui reste un ilot de stabilité.
Vous comprendrez donc, Excellence Monsieur le Président de la République que nos revendications structurelles demandant une réactualisation de la Régulation avec la prise en charge du secteur digital par un organe de Régulation plus efficace que l’actuel, soit encore actuel. Devrons nous aller vers une interconnexion CNRA-CDC et ARTP pour avoir le bon système ? c’est une question ! Nos assises des médias y apporteront certainement une réponse qui on l’espère sera examiné avec soin par son Excellence.
Vous noterez Monsieur le Président de la République que notre demande formulée de voir notre pays se doter d’une loi d’accès à l’information, nous semble encore plus pertinent. Là où elle existe, les journalistes sont tenus de documenter les informations qu’ils diffusent et ne se contentent plus d’être des relais de propagande. Aussi Excellence Monsieur le Président de la République, une nouvelle Loi sur la publicité qui intègre le digital et les milliards de dollars générés, est une urgence. Voici une niche extraordinaire d’opportunité qui rémunère plus que les maladroites tentatives de créations de contenus dont notre jeunesse est si friande.
Il est possible pour le Sénégal, de se doter d’un écosystème des médias, efficace, économiquement valable, qui intègre la transition numérique, et surtout ou les productions et les contenus sont utiles. Ce n’est ni une chimère ni un rêve. Cela nécessite juste une Volonté Politique assumée par les gouvernants et des règles adoubées par les acteurs des médias objectifs et honnêtes.
Le SYNPICS avait pris l’initiative de lancer les assises des médias dans ce sens avec l’implication de tous les acteurs. Quelques réserves ont été émises par le patronat, dans l’approche. Notre plénipotentiaire désignée Diatou Cissé Coulibaly, est aujourd’hui parvenu à rapprocher les positions et dès la semaine prochaine, le président du comité scientifique le Professeur Mbaye Thiam nous fera l’honneur de relancer la machine.
Nous vous donnons rendez-vous dans un délai assez proche, pour poser sur votre table les Conclusions de cet exercice que nous voulons le plus consensuel et ouvert possible. Mais également ces assises seront sans complaisance. Elles ne seront pas un cadre de collusion entre acteurs qui défendent leurs intérêts égoïstes mais un moment d’introspection et de projection absolument objectives.
Mais à quoi servira tout cela, si en amont les difficultés structurelles actuelles de la Presse ne sont pas résolues ?
Bien informés les hommes sont des citoyens, mal informés ils deviennent des sujets (Alfred Sauvy).
Peut-on prétendre être bien informés lorsque les professionnels en charge de cette mission sont dans une pauvreté organisée ?
Monsieur le Président de la République, une presse précarisée, est un danger pour la démocratie. La plupart de ces jeunes reporters, là-bas au fond de la salle, ne reçoivent pas le salaire minimum garanti par l’Etat du Sénégal. Ne parlons même pas des cotisations sociales (IPRES et Caisse de Sécurité) qui sont ponctionnés par près de 80 % des entreprises de presse et non reversées au point qu’il est très fréquent surtout ces dernières années de voir des professionnels, partir à la retraite et se retrouver avec zéro pension. C’est triste mais c’est ça la vérité ! Les dernières enquêtes réalisées par la Direction Générale du Travail confirmeront cette tendance.
La conséquence néfaste de cette précarité institutionnalisée est plus que néfaste.
Le secteur des médias est très perméable et est investi par des lobbyistes en tout genre qui créent des supports à tour de bras. 29 quotidiens dénombrés, près de 400 sites d’information recensés, des web-tv à la pelle, et le tout en violation flagrante du code de la presse. Le tout sans que les autorisations préalables ne soient exigées, sans que les contrats de travail en bonne et due forme ne soient exigés, sans qu’un contrôle systématique du respect par ses médias de leurs obligations sociales ne soit exercé. Mieux, Monsieur le Président de la République aujourd’hui il est même constatable que des chaines Youtube qui utilisent le qualificatif TV se créent avec des voix anonymes, diffament à longueur de journée et parce que disposant d’un bon trafic encaissent des royalties sans qu’on puisse mettre un visage ou un nom sur le ou les propriétaires.
Si tout cela est possible, c’est parce que nous avons une très faible régulation, obsolète et dépassée. Et si tout cela ne s’arrête, ce n’est pas demain la veille que le Sénégal retrouvera la sérénité indispensable à l’amorçage de son développement.
Excellence Monsieur le Président de la République,
A la lecture notre cahier de doléances de cette année, vous n’y verrez pas trois points revendications. Ils ont pris du temps mais ont été satisfaits. On ne parlera pas de gouvernance de la maison de la presse, aujourd’hui tous les instruments sont mis en place sauf une meilleure représentativité dans son conseil d’administration, des autres acteurs des médias.
On ne vous parlera pas de décret d’application du code de la presse non plus. C’est effectif. On ne parlera pas de finalisation de la restructuration institutionnelle de l’APS, à part la libération d’une partie du capital, c’est également une revendication qui appartient au passé.
On y inscrira cependant un nouveau point qui nous préoccupe : il s’agit de l’ostracisme syndical qui semble être érigé en système de management. A part TDS où un dialogue franc et permanent est entretenu par les partenaires sociaux et la direction générale, les médiats publics sénégalais connaissent tous une tension sociale au moment où pourtant l’Etat a augmenté leurs ressources.
Monsieur le Président de la République, lorsqu’une affectation est brandie comme sanction d’un agent, c’est grave. Tout agent est affectable et l’équité territoriale recommande que les ressources humaines de qualité soient déployées sur l’étendue du pays. Mais lorsque cette affectation intervient à la suite de divergence syndicale, lorsque surtout on constate que ces affectations font suite à une candidature pour un poste de délégués du personnel, cela devient alarmant. Lorsqu’une direction met au frigo des agents du fait de leur refus de rejoindre un nouveau syndicat créé de toute pièce par cette même direction, c’est petit. Lorsque Monsieur le Président de la République, l’on décide de retenir volontairement et en violation flagrante de la loi, le salaire d’un travailleur pour tenter de le faire plier, c’est ignoble.
Lorsqu’on décide d’affaiblir par des procédés comptables une coopérative, une mutuelle ou un IPM, c’est inacceptable.
Lorsqu’on cumule huit licenciements en quatre ans de présence à la tête d’un média public, une moyenne de 2 licenciements par an, le problème ne vient plus des travailleurs mais du manager.
Il s’agit là de tentatives de musèlement de leaders syndicaux dans des médias publics dont je suis hélas la plus grande victime, et ce depuis plus de trois ans. Pour faire taire un secrétaire général de syndicat, coupable de soutenir ses camarades, la décision inique a été prise de lui couper son salaire. Comme ça ! et de l’obliger à passer la plupart de son temps au tribunal. Mais heureusement Dieu est au contrôle comme disent nos amis Ivoiriens.
Vous verrez donc Monsieur le Président de la République dans la rubrique revendications nouvelles, l’évocation de l’APS, du Soleil et de la RTS dans le cahier de doléances.
Monsieur le Président de la République, notre cahier de doléances de cette année, surlignera les nombreuses entraves à la liberté syndicale qui, y ont cours.
Cela d’autant que sur ces dernières années, l’Etat du Sénégal a fait des efforts financiers considérables pour élever le niveau de performance des médias, notamment publics. Au moment où les budgets ont quasiment doublé, voir la situation sociale se dégrader sur fonds de rétrogradation d’agents, d’affection-sanctions, de licenciements, d’affaiblissement des leaders syndicaux à la RTS, au Soleil et à l’APS, est une source de désordre.
Monsieur le Président de la République, il est également inquiétant que les journalistes, employés par l’Etat du Sénégal dans sa propre administration, comme chargé de communication, ne puissent pas hélas encore bénéficier de la nouvelle convention collective. Oui, les directives directives du Président de la République, en Conseil des Ministres, le 15 juillet 2020 et le 27 janvier 2021, connaissent un retard d’exécution inquiétant de la part des ministères de la fonction publique et de celui des finances, notamment de la direction de la solde.
Heureusement que nous avons une grande satisfaction concernant la convention collective. Il s’agit de sa mise en œuvre quasi-totale par le secteur parapublic, notamment les administrations territoriales et les universités. À part celle de Thiès qui accuse encore un retard.
Excellence Monsieur le président de la République
Merci de votre écoute
Vive le Sénégal
Vive les travailleurs